une fin de vie digne : Madame Bonbons l’aurait bien aimé ainsi, a fortiori quand elle a été si bien remplie

PINDER IS BACK WITH MADAME BONBONS

… En 2009, malgré son déambulateur, ultime compagnon de fin de vie qui la supporte en permanence dans la posture dégradée que chacun peut imaginer, elle prend, à 94 ans, toujours et encore le soin de gérer seule, les artifices de sa féminité. Toute sa vie, Marinette a été volontaire, bosseuse tout terrain et par tout temps, décidée, pugnace, ne s’en laissant pas raconter, mais elle est restée d’abord féminine. Elle trône maintenant toute la journée sur sa rigide ‘’chaise-fauteuil’’ en paille, telle une Reine mère, certes fatiguée, mais une vieille Reine droite dans ses pantoufles à carreaux. Maria Théodosia Victoria  reste prête et digne, elle attend juste l’heure précise, sans se poser de questions, celle que personne ne peut rater, même les éternels retardataires. Elle pourrait se dire que cette heure ultime, elle l’a plusieurs fois raté depuis 30 ans, mais non. Elle sait simplement que ce n’était pas la bonne, celle qui va arriver sous peu. Elle ne la craint pas du tout, puisque c’est devenue une amie, celle des rendez-vous manqués. Parée pour le décollage, sa check-list validée, Mamie est coiffée d’une belle mise en plis sur cheveux châtain-acajou, maquillage réussi, boucles d’oreilles colorées, collier un peu voyant, jolie broche dorée et un foulard, sur une robe en couleurs, diffusant son parfum préféré. Voilà, qui est encore et toujours Mamie, vers la fin de son parcours, prête à entrer en piste céleste, belle, parfumée et discrètement solaire, à cause de l’éclipse prochaine et des nuages à l’horizon. Je mesure surtout en écrivant ce livre, à quel point elle a été belle ma Mamie d’amour, toute sa vie et jusqu’au dernier souffle... ….. Quel étonnant équilibre dans les chiffres de ta vie ! Pourtant, la fillette très décidée qui sortait ses vaches et ses chèvres, l’adolescente qui aidait ses parents pour les récoltes, la jeune fermière volontaire qui participait aux fenaisons avec les villageois et qui vendait ses fromages sur les marchés du canton, cette adorable Marinette a eu l’incroyable chance de découvrir une vie à l’opposé, vraiment à mille lieux de son microcosme rural. Mais elle aura éprouvé surtout le plaisir de familiariser, copiner, aimer, diner, rire et chanter, avec des célébrités des Arts au sens large. Ce mois d’août 2009 est très chaud et malgré le fait que j’y pense depuis plusieurs mois, j’ai du mal à voir très péniblement mourir ‘’la Mamma’’. Elle est alitée depuis dix jours à l’hôpital Purpan, pavillon Dieulafoy. Cela fait suite à une série de ‘’montagnes russes’’ d’épisodes en cliniques, en maison de repos et  hôpitaux. Je n’ai pu le mesurer et l’apprécier qu’après son départ, mais cette batterie de soins inutiles et très chers a été mise en œuvre pour la remonter. Il fallait alors si souvent, la regonfler, la prolonger, plusieurs fois avec de l’EPO, un fortifiant puissant et des tas d’autres molécules, afin de reculer l’échéance. À quand, une loi sur l’aide à ne plus souffrir et à partir dignement sur la pointe des pieds. Quand on est dans une démarche de pure humanité, on ne souhaite que la délivrance ultime pour les êtres que l’on aime. À l’inverse, on croit préserver et prolonger le malade par amour, mais c’est d’abord soi-même qu’on préserve ainsi que nos faiblesses à affronter le départ. Je ne blâme pas bien sûr, j’ai réagi pareil, mais je constate juste que le parcours avec Mamie, m’aura laissé aussi cette analyse et ce constat en héritage...